top of page

L'évolution des montages

  • Photo du rédacteur: Eric Deboutrois
    Eric Deboutrois
  • 15 févr.
  • 7 min de lecture

Kevin Maddocks écrit que dans les eaux surpêchées l'usage intensif du cheveu fait que la carpe n’a plus de mal à faire la différence entre un appât libre et celui du cheveu. Depuis, les pêcheurs n’ont cessé de chercher (et cherchent donc encore !) toutes les solutions possibles pour faire autrement.


En fait il faut bien comprendre que si les carpes trient (ce qu’elles font instinctivement) ce qui rentre dans leur bouche sans se déplacer, il est assez peu probable qu’elles se piquent seules, sauf si elles ont du mal à recracher une esche piégée, paniquent et qu’en s’enfuyant l’hameçon se pique un peu plus sur l’inertie du plomb. Ce sont deux principes indissociables pour tenter d’améliorer le ratio de touches : celui du montage de fuite (adopté aussi pour pécher loin, de nuit etc.) et celui des montages (dits) anti-éjection.

Bas de ligne et cheveu en mini Dacron
Bas de ligne et cheveu en mini Dacron
ree

Extraits de l’article « la pêche des très grosses carpes » La pêche et les poisson, Henri Limouzin
Extraits de l’article « la pêche des très grosses carpes » La pêche et les poisson, Henri Limouzin

Les montages anti-éjection


Face à la pression de pêche, notamment à Savay, plusieurs montages virent le jour en Angleterre. Le D rig est un de ceux là. Il a été mis au point en 1985 par Roger Smith, en réalisant une boucle en nylon pour que l’hameçon reste en bouche et ne soit pas soufflé avec l’appât.

Extrait du livre « l’évolution de la pêche de la carpe » (1993), de Léon Hoogendijk
Extrait du livre « l’évolution de la pêche de la carpe » (1993), de Léon Hoogendijk

Toujours à Savay, à peu près à la même époque (1986), Martin Locke et Rob Maylin partaient du principe de reculer l’esche sur l’hameçon pour que celui-ci aille un plus loin à l'intérieur de la bouche et qu’en y restant un peu plus longtemps il ait ainsi un peu plus de chance de basculer et de piquer. Locke raconte que pour ajuster ses montages aux bouillettes de 24 ou 30 mm il ajoutât un morceau de tube à la hampe du Gamakatsu n°10 avec lequel il pêchait. C’est ainsi que naquit le Looney extension avec lequel il captura Sally, une commune de 39 lbs !

Extrait du livre Tiger Bay (1988), chapitre advance terminal rig de Rob Maylin
Extrait du livre Tiger Bay (1988), chapitre advance terminal rig de Rob Maylin

D’autres réfléchissaient à comment faire pour que la pointe de l’hameçon bascule dès que le bas de ligne se tendait et pique ainsi avant que la carpe ne recrache l’esche. Le principe du Bent hook (hameçon coudé) a été développé par Jon Holt en 1986-1987, alors qu'il pêchait à Longfield, une des eaux considérées comme les plus difficiles d’Angleterre à l’époque. Au début des années 90, Partridge hooks commercialisa deux hameçons coudés, le Ritchie MacDonald (Z13) et le Piggyback bent hook (Z14).


Mais le mieux est parfois l’ennemi du bien. Comme les bent hooks tournaient vite sur la pointe lorsque le bas de ligne se tendait, ils piquaient souvent loin dans la bouche, accrochant ainsi les chairs tendres et occasionnant des boutonnières dans la bouche des carpes. Ils ont été interdits. Pour autant, dans bien des formes d’hameçons modernes (œillets rentrant, longues hampes courbées…) et montages ultérieurs (avec kickers), le principe mécanique sera gardé et amélioré pour essayer de piquer vite sans abîmer les bouches. Le préfigurateur des actuels kickers est l’Aligneur de ligne, mis au point par Jim Gibbinson en 92/93.


A Woburn Sands, Martin Clarke avait trouvé une autre solution en 86/87. Il développa une version « souple » du D rig, le Slip D rig, pour donner encore plus de facilité à la pointe de tomber. Il améliora sa première version en 2002, avec l’utilisation des tresses gainées pour avoir à la fois un D souple et un bas de ligne plus rigide. (C’est Dave Chilton – Kryston – qui a commercialisé en 1995 la première tresse gainée, la Snake-Skin).


D rig
D rig
Slip D rig avec aligneur de ligne moderne
Slip D rig avec aligneur de ligne moderne

Vers 1990, Steve Renyard conçu le montage Withy pool rig alors qu’il pêchait le syndicat du même nom. Il en a basé la courbure sur le contour de la lèvre inférieure d'une carpe, de sorte que tout poisson qui l’aspire se pique, idéalement au milieu de la lèvre inférieure. Steve Renyard a également inventé l’Hermit rig (montage élastique) pour essayer de piéger les poissons qui se déplacent lentement ou sans aller bien loin entre chaque bouchée.


Le Blow Back rig est un montage conçu par Kevin Nash (1996) dans lequel une gaine en silicone maintient le cheveu sur la hampe. Cette gaine, qui peut reculer lorsque la bouillette est soufflée et faire en sorte que la pointe tombe, sera ensuite remplacé par un anneau coulissant (ring) auquel sera noué le cheveu. C’est également Nash qui réalisa les premiers clips plomb en 1992.


Withy pool, blow back et spinner rigs, extrait de la rubrique « Rig world » (Carpworld 1999)
Withy pool, blow back et spinner rigs, extrait de la rubrique « Rig world » (Carpworld 1999)

Vers 1996/97 Tim Paisley et Dave Chiltern mettent au point le combi-rig pour limiter les emmêlements mais aussi pour rendre l’éjection plus difficile en associant une morceau de tresse en partie terminale et une partie rigide en Amnésia. Aujourd’hui on utilise des loop en tresse que l’on raccorde à des booms en fluoro ou, à l’opposé, on fait des « combi inversés » pour allonger la hampe des hameçons.

Combi-rigs de Tim Paisley (Carpworld focus n°108, 1999)
Combi-rigs de Tim Paisley (Carpworld focus n°108, 1999)

Des montages équilibrés aux flottantes


Kevin Maddocks raconte aussi comment avec Middleton ils ont essayé de compenser le poids de leurs hameçons en collant un morceau de polystyrène sur la hampe, ouvrant ainsi la voie des montages équilibrés (balanced hookbaits). Dans la seconde moitié des années 1980 Martin Clarke et Rob Maylin mirent au point différents montages cherchant à ce que seul l’hameçon soit aspiré (le scorpion rig, le snake rig de Clarke) ou que la bouillette rendue flottante en la passant au micro-onde (Maylin), soit plus facilement aspirée.


Extrait du livre Tiger Bay (1988), chapitre advance terminal rig de Rob Maylin
Extrait du livre Tiger Bay (1988), chapitre advance terminal rig de Rob Maylin

Le Hinged stiff rig a été affiné et modifié par Lewis Read et Terry Hearn sur la base d'un montage qu'Alan Welch et ses amis (Andy Kidd…) utilisaient. Le nœud Domhoff, créant un « D » était parfait pour escher une pop-up sur les fameux hameçons Drennan Continental Boilie Hooks ! La portion de fil semi-rigide devenait une extension de la hampe de l'hameçon, formant ainsi une sorte de long shank alternatif.


Chod rig

Frank Warwick utilisait un montage préfigurateur (le short rig, « up the leader ») sur le lac Manor Farm, à Linear Fisheries, que Terry Hearn a amélioré puis promu au début des années 2000 comme le Chod Rig. NB : c’est Zenon Bojko qui a développé le montage hélicoptère comme alternative aux tubes anti-emméleurs en 1989 et Dynamite Baits, sous l’impulsion de Frank Warwick, qui a commercialisé les prem ières pop-up de couleur fluoro.

Montage Short rig de Frank Warwick détaillé en 1999 dans le magazine Carpworld
Montage Short rig de Frank Warwick détaillé en 1999 dans le magazine Carpworld
Montage Chod rig de Terry Hearn dans son livre « Still searching » (2006)
Montage Chod rig de Terry Hearn dans son livre « Still searching » (2006)

Le montage 360° (2001/2006)

C’est Dave Lane qui a mis au point ce montage pour pêcher avec des pop-up. En utilisant des Fox série 5 (longue hampe courbe) le montage ressemble à un hinged-stiff qui peut tourner à 360°. Il a néanmoins l’inconvénient de pouvoir s’accrocher dans le filet de l’épuisette et le cas échéant de causer des blessures à la bouche des carpes ; de nombreux plans d’eaux anglais l’ont interdit. C’est le précurseur du Ronnie rig popularisé avec l’arrivée des émerillons quick change.


Du stiff rig au multi rig 

Mike Kavanagh (qui tenait la rubrique « Rig world » dans la revue Carpworld) a pris le contre pied total des bas de ligne souples en créant le premier Stiff Rig (montage rigide), noué à partir d'Amnesia. La relative raideur du bas de ligne rendant plus compliquée l’éjection de l’esche.

Stiff rig de Mike Kavanagh détaillé dans Advanced Rig Book de Korda (1996)
Stiff rig de Mike Kavanagh détaillé dans Advanced Rig Book de Korda (1996)

Il est également à l'origine du Multi Rig (expérimenté sur Harefield en 2000 et popularisé vers 2007 suite à de nombreux gros poissons pris par John MacAllister) qui permet de présenter une pop-up très près du fond, et de changer très rapidement son hameçon à œillet sortant (type chod) grâce à une boucle réalisée sur une tresse gainée. (Il diffère du slip D rig réalisé avec une tresse classique et esché avec une bouillette dense ou un wafter).


ree


Quelques autres montages


KD Rig (2010)

Rien à voir avec un D rig, puisque les initiales sont celles de son inventeur, Kenny Dorsett. Il s’agit en fait d’une façon particulière de réaliser le nœud sans nœud pour positionner le cheveu très près de l’œillet de l’hameçon pour décaler le centre de gravité de l’hameçon vers la pointe. Il est souvent associé à une flottante équilibrée par une petite cendrée sur le cheveu ou un wafter, présenté au ras du fond.

ree

Shot on the hook

Encore un montage qui a été révélé au grand public par Franck Warwick (vers 2004) et que j’ai pour ma part découvert sous la plume du hollandais Ernesto Kamminga, à l’époque où il était chez Korda (début années 2010). L’idée est encore d’accélérer la chute de la pointe grâce à une petite plombée positionnée derrière l’ardillon.

article de Franck Warwick dans le n°1 de Carpe Scène Collector (2004)
article de Franck Warwick dans le n°1 de Carpe Scène Collector (2004)

L’idée est la même avec un Flipper rig qui utilise le poids d’une esche dense pour entraîner la pointe de l'hameçon lorsque le bas de ligne se tend. Pour cela il faut que le cheveu, plutôt long, parte à la base de la pointe de l’hameçon, maintenu par une gaine silicone de faible diamètre (0,5mm).

ree

Le German Rig, 2013

C’est l’anglais Mat Woods qui a promu le German Rig que lui avait montré l’allemand Christian Kessler. A l’aide d’une tresse gainée on fait un nœud sans nœud sur un hameçon courbe. Le cheveu est remplacé par un émerillon qui coulisse sur la hampe, arrêté par une perle, sur lequel est esché un appât dense (ou équilibré), de telle sorte que l’hameçon se présente sous l’esche.

ree

(Le nœud sans nœud peut-être remplacé par un émerillon QC - sans anneau pour limiter les emmêlements - on parle alors d’un « Turbo German Rig »).


Ronnie rig (ou spinner rig)

Utilisé par Gary « Ronnie » Archer et Ian Stott aux alentours des années 2013-2014 à Wellington Country Park, avant que d’autres membres du syndicat ne le découvrent et que le montage soit médiatisé. Ma combinaison préférée pour faire un Ronnie rig et pêcher avec une pop-up est d’associer un émerillon QC à anneau avec un hameçon Gardner CVR (Curved Rigga) en taille 4, sur la hampe duquel peut coulisser un micro émerillon à anneau. Pour la petite histoire le Ronnie original était monté en slip D rig. Ce montage s’inscrit pleinement dans la lignée du Chod et d’un montage déjà appelé spinner rig à la fin des années 1990.

Spinner Carp R us (fin années 90)
Spinner Carp R us (fin années 90)
Ronnie rig
Ronnie rig

Il serait trop long de passer tous les montages en revue et d’ailleurs certainement impossible d’être exhaustif tant il y a de variantes. Pour conclure, on constate à travers cet historique que les grands principes sont restés les mêmes. Les montages ont essentiellement évolués avec la diversification (et la qualité) des matériaux, l’apparition de petits accessoires et beaucoup de jus de cerveau !

Les plans d’eau anglais étant souvent surpêchés, face à ces conditions particulières il n’est pas illogique qu’on se soit posé beaucoup plus de questions d’un côté de la Manche que de l’autre, sur le continent.



Commentaires


bottom of page